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lier de conduire l’art, par une pente rapide, à devenir la fabrication chimique du tableau. Les triomphes, dans cette officine, consistent non à obtenir l’admiration pour les œuvres qu’on y élabore, mais pour les recettes savantes qui y concourent et les ingénieux procédés avec lesquels on en triture les matériaux. L’école du dessin, quand elle consent à ne pas calquer et recalquer, en l’estropiant, la délinéation ancienne, incline à procréer des types tellement laids ou tellement niais qu’on les admire sur parole, et qu’il faut, pour les comprendre, se reporter à quelques sonnets plus ou moins entortillés sur les nuages, sur l’invisibilité, sur l’immuable, sur l’immensité, et sur tous les termes enfin où l’intelligence s’abîme. Autant l’une est fière de son habileté, de son audace, de son piquant, de son ragoût, de son beurré, de sa sauce, etc., car tous les termes de la cuisine y ont passé, autant l’autre est résignée et confite dans sa laideur, dans sa pâleur, dans sa nudité grelottante, dans son servilisme hébété. Ceux qui résument le tout, et mettent chaque chose à son plan et à son lieu, appellent l’une l’école des cerveaux exaltés, des imaginations fougueuses, et l’autre celle des convictions austères et des hautes raisons. On rit des uns, ou l’on en devient maniaque. On plaint les autres, ou on leur devient dévot. En somme, d’un côté le vice, de l’autre la vertu en peinture ; le vice avec ses allures échevelées, ses mystères curieux, ses charmes funestes ; la vertu