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pareils quant à la solidité de la méthode et à la grandeur du résultat, eurent emporté dans la tombe le secret de leur force et de leur fécondité, on commença, comme nous l’avons déjà dit, à voir poindre les tentatives des contrefacteurs. A ceux-là, la nature n’était certes pas nécessaire ! Un maître, ou plusieurs maîtres d’adoption, dont ils affectaient de singer ou de combiner les manières, voilà le monde arbitraire et vide qu’ils osèrent, dans leurs lâchetés, mettre en rivalité, en contradiction avec le monde réel et abondant de Dieu ; ce que la nature n’avait pas fourni aux maîtres, c’est-à-dire leurs erreurs et leurs faiblesses, devinrent le patrimoine des contrefacteurs, tandis qu’ils désertèrent ce que la nature avait prodigué à ces hommes, la vérité et la beauté. Ainsi se gaspilla le trésor de la tradition, qui s’altère dans sa transmission s’il n’est incessamment retrempé à sa source, et qui s’accroît au contraire avec ce soin pieux. Les maîtres, renseignés par leurs devanciers, s’inspiraient de la nature ; les contrefacteurs s’inspirèrent des maîtres et se renseignèrent de la nature, si encore cette dernière impulsion de la conscience, cette dernière précaution de l’instinct fut gardée ! L’art bientôt eut ses rhéteurs. Plus la tradition, réduite à elle-même, s’oblitéra, plus on se mit en dehors de l’art vrai, plus les doctrines haussèrent le ton, plus elles furen précises et absolues. — Envahissantes et vivaces comme les plantes stériles, elles étouffent et affament, surtout aujourd’hui, l’art moderne. De toutes ces théories, la plus