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précieux, ne put jamais lui donner plus de douceur et de morbidesse ; et il en fut peut-être ainsi, parce qu’il recherchait certaines oppositions d’ombres et de lumières brusquement tranchées, qui, en dépit de ses efforts pour imiter la nature, rendaient âpre et choquant l’aspect de son coloris.

On rencontre de nombreux ouvrages de Giovanni Martini en plusieurs endroits du Frioul, et particulièrement à Udine. La cathédrale de cette ville possède de lui un saint Marc assis et entouré de divers personnages. Ce tableau, qui est peint à l’huile, est le meilleur qu’il ait jamais fait. Dans l’église des religieux de San-Pier-Martire, sur l’autel de Sant’-Orsola, on en voit encore un autre de sa main, représentant sainte Ursule, environnée de quelques vierges dont les têtes sont pleines d’agrément.

Sans parler de son talent de peintre qui, en somme, était assez distingué, Giovanni fut doué par la nature d’un extérieur beau et gracieux, d’une pureté de mœurs exemplaires, et (ce qui n’est à dédaigner) d’un tel esprit d’ordre, qu’il laissa, après sa mort, de gros biens à sa femme, à défaut d’enfants mâles. Cette dame qui était, m’a-t-on dit, aussi sage que belle, sut se conduire, pendant son veuvage, de façon à marier ses deux filles aux maisons les plus riches et les plus nobles d’Udine.

Pellegrino de San-Daniello surpassa Giovanni Martini, son condisciple et son rival. Il fut baptisé sous le nom de Martino, qu’il changea pour celui de Pellegrino, que son maître Giovan Bellini lui donna comme un témoignage de l’admiration qu’il avait