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de Saint-Pierre, un seigneur qui se vantait d’entendre parfaitement Vitruve, et qui se posait en censeur de tous les travaux. Quelqu’un dit à Michel-Ange : « Vous avez fait acquisition d’un homme de « grand esprit. » — « C’est vrai, et de peu de jugement, » repartit Michel-Ange.

Un peintre avait pillé nombre de peintures et de dessins pour composer un tableau. Michel-Ange dit à un de ses amis qui lui demandait ce qu’il pensait de cette rapsodie : « Ce n’est pas mal ; mais lorsque viendra le jour du jugement où chacun reprendra ses membres, que restera-t-il sur cette pauvre toile ? rien. » — Avis aux artistes.

Maestro Antonio Bigarino, sculpteur de Modène, avait exécuté des figures en terre cuite, coloriée ensuite à l’imitation du marbre. Michel-Ange s’écria en les voyant : « Si ces terres pouvaient devenir marbre, malheur aux statues antiques (153). »

On lui conseilla un jour de se mettre en garde, contre Nanni di Baccio Bigio, qui voulait entrer en concurrence avec lui : « Quelle gloire aurais-je à vaincre un lâche ? » répondit-il.

Un prêtre de ses amis lui dit un jour : « Pourquoi ne vous êtes-vous point marié ? vous auriez eu des enfants à qui vous auriez laissé vos chefs-d’œuvre. » — « J’ai une femme de trop, lui répondit Michel-Ange, une femme qui m’a toujours persécuté, c’est mon art, et mes ouvrages sont mes enfants. Voyez Lorenzo, fils de Bartoluccio Ghiberti, malheur à lui s’il n’eût pas fait les portes de l’église de San-Giovanni ! Ses enfants et ses neveux