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volontiers livré au travail, mais il n’avait pas le feu sacré : quand la cire est dure, elle ne reçoit pas l’empreinte aisément. Ascanio de Ripa Transone n’épargnait pas les efforts pour arriver au but désiré, mais qu’a-t-il produit ? Il employa plusieurs années à peindre un tableau dont Michel-Ange lui avait donné le carton ; toutes les espérances qu’on avait conçues de lui s’en allèrent en fumée. Je me rappelle que Buonarroti, ayant pitié de ses peines, l’aidait souvent de sa main, mais ses soins furent inutiles (145).

Michel-Ange me dit plusieurs fois qu’il aurait écrit pour ses élèves un livre sur l’anatomie, s’il ne se fût défié de sa plume ; il savait cependant rendre clairement ses pensées, car il s’était nourri de la lecture des poésies italiennes, et surtout de celles de Dante et de Pétrarque ; déjà il avait composé des madrigaux et des sonnets remarquables (146). Messer Benedetto Varchi avait même fait à l’Académie de Florence une dissertation apologétique sur le sonnet suivant :

Non ha l’ottimo artista alcun concetto.
Ch’ un marmo solo in se non circoscriva
Col suo soverchio e solo a quello arriva
La man che obbedisce all’intelletto.

Il mal ch’ io fuggo, e ’l ben ch’ io mi prometto,
In te, donna leggiadra, altera e diva
Tal si nasconde, e, perch’ io più non viva,
Contraria ho l’arte al desiato affetto.

Amor dunque non ha, nè tua beltate,
O fortuna, o durezza, o gran disdegno,
Del mio mal colpa, e mio destino, o sorte,