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honneur était dû à Jules et à Clément. Paul III, loin d’être blessé par cette franchise, fut plein de respect pour celui qui avait le courage de lui résister.

Il existe tant de copies et de gravures du Jugement dernier, qu’il serait inutile de perdre du temps à en donner une description détaillée. Nous nous occuperons donc seulement des principales parties de cette immense composition, où Michel-Ange s’attacha à représenter les attitudes les plus variées du corps humain. Tout entier à la plus grande difficulté de l’art qui réside dans l’imitation des formes humaines, il négligea l’agrément du coloris, et les choses de caprice et de fantaisie, et enseigna quelle route on doit prendre pour arriver à la perfection.

Michel-Ange avait presque achevé le Jugement dernier, lorsque Paul III alla le visiter, accompagné de Messer Biagio da Cesena, son maître des cérémonies. Sa Sainteté ayant demandé à ce scrupuleux personnage ce qu’il pensait de cette peinture, il répondit que cette foule de figures nues était très mal placée dans un lieu si respectable, et qu’elle convenait mieux à une salle de bains ou à une taverne qu’à la chapelle du pape. Aussitôt que Paul III fut sorti, Michel-Ange, pour se venger de ce méchant propos, jeta Messer Biagio, sous la forme de Minos, au milieu d’un groupe de démons  (88). Biagio se plaignit au pape, et supplia l’artiste de passer l’éponge sur cette figure ; mais ses instances furent vaines, et il se vit condamné à l’immortalité (89).

Dans ce temps, Buonarroti se laissa tomber de