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laquelle on s’est accoutumé à traiter Vérone. Et l’étonnement est près de se changer en une légitime indignation, lorsque l’on songe que deux ou trois voix à peine se sont élevées pour tenir compte à cette intéressante et glorieuse cité des grands hommes sortis de son sein, pour la remercier d’avoir donné le jour au savant et austère Vitruve, à Catulle, le plus gracieux des poètes, à Cornelius Népos, le précurseur de Plutarque, et à Pline l’ancien, que l’on a justement proclamé le génie le plus encyclopédique de l’antiquité. Quand, par hasard, on prononce le nom de Vérone, y a-t-il quelqu’un pour rappeler qu’elle a produit Fra Giocondo, le collaborateur de Michel-Ange, de Raphaël et de San-Gallo ; et Michele San-Micheli, l’inventeur du système moderne de la fortification des places, l’architecte de tant de palais, de châteaux et d’églises, que Vasari, et tous les historiens qui sont venus à sa suite, ont renoncé à en donner l’énumération complète ? Mais aujourd’hui connaît-on seulement Fra Giocondo et Michele San-Micheli ? Pour les connaître, il faut aller à Vérone ; et Vérone est frappée d’une telle nullité, d’un si parfait oubli, qu’il n’est pas rare de rencontrer des gens fort éloignés de soupçonner, malgré l’analogie des noms, qu’elle ait donné le jour à l’illustre Paul Veronese.