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pauvres gens à des choses de peu d’importance, dont partie, bien entendu, lui avait été payée d’avance comme arrhes. Malgré les instances de Laurent, il ne consentit jamais à le servir avant ses pauvres pratiques. « Ils sont venus, disait-il, avant vous à mon atelier, et j’estime autant leurs écus que ceux de Laurent. »

Quelques jeunes gens le prièrent un jour de leur fabriquer, d’après un dessin qu’ils lui montraient, un outil armé d’une vis, propre à soulever et à rompre des barres de fer. Il refusa en les gourmandant : « Je ne travaillerai point à ce que vous me demandez ; vous voulez des instruments qui servent aux voleurs et à ceux qui enlèvent ou qui déshonorent les jeunes filles ; ces outils ne conviennent ni à moi ni à vous qui me paraissez être des gens de bien. » Ceux-ci, entendant son refus, insistèrent pour qu’il leur indiquât un ouvrier, à Florence, qui pût les satisfaire. Alors le Caparra se mit en fureur, et les jeta à la porte en leur crachant une grosse injure. Jamais il ne travailla pour les juifs, dont les écus, selon lui, étaient pourris et infects. Homme bon et religieux, mais de cervelle fantasque et obstinée, les plus brillants appâts ne purent le décider à quitter Florence où il vécut et mourut.

J’ai fait mention de ce Caparra parce qu’il fut unique dans son art. Il a été et sera toujours sans rivaux, comme le prouvent les magnifiques ornements du palais des Strozzi.

Mais revenons au Cronaca. Il décora la cour du palais de deux ordres de colonnes, les unes doriques,