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néral, car Raphaël avait occupé à la cour une place de gentilhomme de la chambre, et était tendrement aimé du saint pontife à qui sa mort fit verser des larmes amères. Bienheureuse ton âme, ô Raphaël ! le monde entier se prosterne devant tes œuvres ! Et la peinture, que n’est-elle descendue dans la tombe avec toi ! Lorsque tu fermas les yeux, pour elle aussi la lumière s’éteignit. C’est à nous maintenant d’imiter les modèles parfaits qu’il nous a laissés, et de conserver dans nos cœurs son souvenir gravé en traits ineffaçables ; car c’est par lui que nous avons vu l’art amené à cette perfection que nous n’osions espérer. Et ce bienfait n’est pas le seul qui lui ait mérité notre reconnaissance. Il ne cessa, tant qu’il vécut, de nous offrir le meilleur exemple à suivre dans nos rapports avec nos égaux, et avec ceux qui sont placés au-dessus et au-dessous de nous. Il avait su établir une telle harmonie entre tous les artistes qui composaient sa nombreuse école, quel que fût leur degré de talent, que jamais le moindre démêlé, le moindre sentiment de jalousie ne vint troubler la durée de cette union, qui n’exista jamais aussi parfaite que de son temps. Ce rare accord était produit par le talent et le caractère affable de Raphaël, et surtout par ses qualités heureuses qui lui gagnaient tous les cœurs, au point que non seulement les hommes, mais les animaux eux-mêmes, l’affectionnaient. Le ciel lui accorda peut-être ce don précieux pour former un contraste frappant avec ce qui se passe ordinairement entre les gens de notre profession. Si un peintre, même de ceux qui lui étaient inconnus, lui demandait un des-