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par la chose même qui les a produits. Aussi voyons-nous le Vasari exalter l’académie de Laurent de Médicis, et s’en promettre les meilleurs fruits.

À propos du Torrigiano, le Vasari soulève une déclamation qui ne peut l’atteindre, quand on y regarde. Le Torrigiano n’était pas un vieillard envieux et impuissant à côté du Buonarroti encore enfant ; car ils étaient tous deux pleins de talent, d’avenir et de jeunesse. Ce n’était point non plus un jeune homme adonné aux plaisirs et négligeant le travail : sa vie interrompue, mais féconde en œuvres fortes et graves, en dépose suffisamment. Qu’il ait eu un caractère farouche et tendant même à l’envie, cela est possible ; mais Michel-Ange ne lui cédait guère à cet égard : sa brigue contre Léonard et beaucoup d’autres faits le prouvent. D’ailleurs il est notoire maintenant que Michel-Ange fut l’agresseur dans cette querelle fâcheuse qui exerça une si fatale influence sur la vie entière du Torrigiano, et qui lui acquit à Florence une si triste célébrité. Condamné par elle à une existence précaire et aventureuse, le Torrigiano laissa cependant des chefs-d’œuvre partout où il passa. La statue de saint Jérôme, dans le monastère de Buenavista, a été regardée jusqu’à ce jour comme la plus belle sculpture qui soit en Espagne, et Francisco Goya entre autres n’a pas hésité, après un long examen, à la mettre au-dessus des sculptures de Michel-Ange lui-même ; il lui trouve un caractère plus grand et une affectation moindre. On conserve encore, dit-on, à Séville un fragment de la Vierge qu’il brisa dans le