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passa donc comme une troupe vaincue sous ces fourches caudines du professorat, et l’art s’arrêta ; il s’arrêta pour rétrograder. Les jeunes artistes perdirent même dans cette retraite leur courage et leur moralité première ; ils y perdirent la persistance dans le travail qui est l’élément du progrès, et l’élévation du caractère qui est l’âme du génie. Aussi le Vasari, sur le penchant du seizième siècle, fait-il appel déjà aux mœurs anciennes et à ces habitudes chastes et studieuses qui avaient rendu les vieux maîtres si grands.

Ce n’est pas que nous prétendions que le Vasari ait eu la conscience entière des dangers qui menaçaient l’art dans son temps, ni de leur cause. C’est surtout quand les événements ont achevé de se produire qu’on en comprend bien l’ensemble et la valeur ; c’est quand le mal est fait qu’on en voit distinctement la source, et souvent même le remède. Mais l’ouvrage du Vasari est plein de ces saillies éloquentes qui peignent l’impression générale sous laquelle se trouvaient placées alors les têtes les plus intelligentes : réflexions plus brillantes qu’efficaces, aperçus plus instinctifs que raisonnés, et qui ne mènent à rien, mais qui ont un grand prix pour les travaux postérieurs. Ce qui manque au Vasari, comme à tant d’autres écrivains de ce temps, qui se sont montrés si bons observateurs, c’est de ne pas avoir rattaché convenablement leurs observations, d’avoir négligé d’en tirer des conclusions, ou d’en avoir conclu de travers ; de façon que parfois ils conseillent de remédier aux abus qu’ils signalent