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niers ouvrages, comme ceux d’Albertinelli, son compagnon d’enfance, s’élèvent à la solidité de couleur du Titien ; qu’il composa d’une manière qui lui est propre, quoique, au premier aperçu, ses dispositions soient si simples qu’on se laisse aller à n’y voir rien de bien particulier ; qu’il montra la science de Michel-Ange et de Raphaël, et la parfaite entente des belles longueurs et du jeu du corps humain, sous les épaisses draperies dont il couvrit généralement ses figures ; qu’il prouva son intelligence de l’architecture, de la perspective et de toute la mathématique de l’art, dans les fonds et les encadrements de ses tableaux.

Ainsi, comme on le voit, ce jeune homme insouciant qui travaille en commun avec l’Albertinelli, qui rêve et pleure aux déclamations de Savonarole, qui apporte le premier sur la place publique ses peintures, et les brûle ; qui s’enferme dans Saint-Marc pour combattre, et a peur ; qui abandonne son art par dévotion, et le reprend par obéissance ; qui jouit à Rome des triomphes de Raphaël et de Michel-Ange, et qui revient à Florence écrasé sous le sentiment de son infériorité ; enfin cette espèce de béat, qui meurt pour avoir mangé des fruits et n’avoir pas fermé sa fenêtre, est cependant un grand maître entre les plus grands[1].

  1. Voir Lanzi, I, 234. — Baldinucci, decenn. X, sect. 3, part. 2. — Bellizzo de Firenzo.