Page:Vasari - Vies des peintres - t3 t4, 1841.djvu/595

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ner à la fois. On a beau tenir compte de leur commun amour du beau, de leur commune avidité de progrès, on distingue trop bien leurs querelles acharnées, leurs menées jalouses, pour voir sans surprise l’unité de leur goût et de leur école se constituer aussi fortement au milieu de tant de débats, et leur unanimité sortir de divisions si profondes.

Il est vrai que les Médicis montrèrent dans ce mouvement une grande adresse et une parfaite intelligence de la mission qu’ils avaient reçue d’enrichir leur ville en illustrant leur règne. Ils comprirent mieux que les gouvernants de nos temps que le rôle du pouvoir n’était ni d’ignorer ces débats, ni de les trancher par l’autorité de son goût particulier. Loin de là, les Médicis alimentaient avec soin cette apparente anarchie ; ils exaltaient la vanité de chacun en distribuant leurs faveurs à tous. Aussi doit-on penser que c’est moins pour l’avoir dirigé que pour y avoir convenablement assisté, que les Médicis obtinrent l’honneur d’attacher leur nom à ce beau siècle.

Quoi qu’il en soit, si l’on veut se figurer ce que devait être la réunion à Florence de tant de caractères différents, dont l’amour-propre était sans cesse fomenté par les concours, les cabales provocantes, les intrigues et les jalousies, on apercevra difficilement comment un artiste d’un caractère doux et timide, d’une âme modeste et naïve, a pu s’y tenir debout et n’y être pas étouffé. Comment l’excellent Bartolommeo a-t-il pu vivre aimé de tous et applaudi par chacun au milieu des discordes florentines ?