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Esprit plane sur toute la scène et l’illumine. Piero a voulu que l’éclat de la divine colombe fût la seule lumière qui éclairât ses figures. Il y a dans ce tableau des parties très bien dessinées et fort gracieuses ; la localité en est fort soutenue, et le paysage très remarquable par la forme étrange des arbres et des rochers.

Dans le même lieu, Piero exécuta sur des gradins plusieurs petits sujets, entre autres une Sainte Marguerite sortant du ventre du dragon. Le monstre est hideux, ses yeux flamboient, tout son aspect menace du venin et de la mort. Je dois dire ici que Piero porta aussi loin qu’on peut l’imaginer le talent d’exprimer les objets effroyables et terribles. Il offrit au magnifique Julien un monstre marin de sa façon, qui était d’une difformité si extravagante, que la nature dans ses plus étonnants écarts n’a jamais pu rien créer qui s’en approchât. Cette peinture est maintenant dans la galerie du duc Cosme, qui possède en outre un recueil d’animaux fantastiques, dessinés à la plume par Piero avec un soin et une patience inimitables. Ce cahier a été donné au duc Cosme par Messer Cosimo Bartoli, prévôt de San-Giovanni, grand amateur et mon ami intime.

Piero, ayant eu à décorer une salle dans la maison de Francesco Pugliese, donna l’essor à tout ce que son imagination fantasque avait de ressources pour créer et agencer les animaux, les accessoires avec l’architecture la plus fabuleuse. J’ignore ce que sont devenues toutes ces petites peintures enlevées de la muraille après la mort de Pugliese et de ses