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vaient Raphaël, Léonard, Michel-Ange, Titien, avec quelques-unes des humiliations subies par le Corrége, et dont le temps a gardé le souvenir.

Dégoûté par les exigences des moines qui l’occupaient, il n’achève pas la tribune de la cathédrale de Parme, et se retire chez lui. Comme si ces gens avaient voulu laisser une preuve du peu de cas qu’ils faisaient de son travail commencé, ils chargèrent de le finir un peintre obscur comme le Corrége, mais resté tel, le Sojaro. On voit celui-ci, dans une lettre conservée, prendre mieux ses précautions que le timide Antonio : « Je ne veux pas, dit-il, être à la discrétion de tant de cervelles. Vous savez bien ce qui a été dit au Corrége dans la cathédrale. »

Il paraît qu’en examinant les dessins que le Corrége présentait, un marguillier lui avait dit : « Est-ce un plat de grenouilles que vous voulez peindre ? » Cherchant à pallier cet outrage, le judicieux Lanzi fait observer qu’un marguillier n’est pas une ville entière. Cela est vrai ; mais il est vrai aussi que l’insolence subalterne d’un commis ou d’un marguillier a pu souvent ruiner l’avenir d’un artiste modeste et sans appui. Il est encore très vrai qu’il serait peu embarrassant d’en trouver des exemples jusque dans notre temps.

Comparez le prix que retirait le Corrége de ses ouvrages à celui dont on payait ceux de ses illustres contemporains. Le Corrége recevait, pour son gigantesque travail de la coupole de Parme, le prix qu’on donnait à Raphaël pour une seule figure de ses stances. Le Corrége donnait son tableau du Christ