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courage et de sa constance ; car si Dieu veut parfois que de telles supériorités restent inaperçues et incomprises, il sait cependant les défendre des injustices et des distractions contemporaines, assez pour que leur mémoire ne s’annihile pas ; et c’est en leur donnant cette conviction du talent qu’il les pousse à l’avenir, à travers leur siècle ingrat.

Mais ces génies dont le présent enregistre à peine l’existence, et dont l’avenir doit proclamer si haut la gloire, sont les écueils où l’historien échoue. Ils demeurent pour nous, comme ces créations spontanées, comme ces apparitions phénoménales, dont la filiation et la loi sont inconnues, et qu’on ne peut rattacher à rien. Car si leurs résultats, que nous admirons, racontent leurs succès et leur force, ils ne peuvent nous dire rien de plus ; et nous devons renoncer aux utiles enseignements que le temps ne nous a pas gardés en anéantissant tous les souvenirs de leur vie et toutes les confidences de leur travail. Quelle a été positivement la marche du Corrége ? quels ont été ses aides et ses obstacles immédiats ? quels ont été ses principes et ses procédés ? nous n’en savons rien, et n’en pouvons rien savoir[1]. Ses ouvrages pourraient seuls nous l’apprendre, mais ils sont trop savants et trop accomplis, pour nous

  1. Voir surtout : Lanzi, Hist. de la Peint., t. III, p. 400-436, et suiv. — Mengs, Mém. sur le Corr., t. II. — Ratti, Not. storich. sinc. intorno la vita e le opere del celeb. pitt. Ant. Allegri da Correggio. Finale, 1781. — Tiraboschi, Not. degl artefici modenesi. Modène, 1786. — P. Affò, Il parmig. servitor di piazza. Parme, 1794. Ragion. sop. una stanza dipinta, etc. Parme, 1794.