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Il y a peu de temps, Messer Luciano Pallavicino, passant à Reggio, vit un très beau tableau du Corrége, qu’il acheta sans se laisser arrêter par le prix, et qu’il envoya à Gènes, comme une pierre précieuse.

On trouve encore à Reggio un tableau qui représente la Nativité du Christ. La lumière qui s’échappe de la personne de l’enfant Jésus éclaire les pasteurs qui l’entourent. On remarque une femme qui, voulant contempler le Christ, est obligée de voiler ses yeux avec la main, ne pouvant supporter l’éclat qui l’éblouit. Ce mouvement si bien exprimé est un miracle de l’art. Au-dessus de la cabane un chœur d’anges chante les louanges de l’enfant divin. Ce groupe semble plutôt descendre du ciel que créé par la main d’un homme.

Il y a dans la même ville un petit tableau de la grandeur d’un pied, qui est la chose la plus précieuse et la plus belle qu’ait produite le Corrége. C’est un Christ au Jardin-des-Oliviers par un effet de nuit. Jésus est éclairé par les flots de lumière qui environnent l’ange qui lui apparaît. La montagne au pied de laquelle prie le Sauveur jette sur trois apôtres endormis une ombre qui leur donne une force et une vigueur inexprimables. Dans le lointain, l’aurore commence à paraître ; on aperçoit plusieurs soldats accompagnés de Judas. Ce sujet, exécuté dans une petite proportion, est si bien entendu, qu’il serait impossible de rien faire qu’on pût lui comparer. Je pourrais m’étendre longuement sur les travaux de ce grand peintre ; mais je m’arrête ici,