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dessiner des nœuds de cordes, disposés de façon à remplir un cercle. Il existe une gravure d’un de ces dessins, remarquable par l’arrangement et les difficultés vaincues, au milieu duquel il a inséré ces mots : Leonardus Vinci academia. Parmi ses dessins de machines, se trouvait ce fameux plan au moyen duquel, un jour, il démontra à plusieurs citoyens de mérite, qui gouvernaient alors Florence, qu’il soulèverait leur temple de San-Giovanni et l’exhausserait sur des degrés sans le détruire. Il s’appuyait sur de si bonnes raisons, qu’il fallait finir par se laisser convaincre ; on ne reconnaissait l’impossibilité d’une semblable entreprise, que quand il n’était plus présent.

Tous les cœurs étaient à lui, tant il avait de prestige et de charme dans sa conversation. Ne possédant presque rien, et peu assidu au travail, il eut toujours des domestiques, des chevaux, qu’il aimait par-dessus tout, et une ménagerie d’animaux de toute espèce, qui faisaient ses délices et qu’il soignait avec une patience et un amour infinis. Souvent, en passant par les lieux où l’on vendait des oiseaux, il en payait le prix demandé, les tirait lui-même de la cage et leur rendait la liberté.

La nature l’avait comblé : éminent en tout genre, sans égal pour comprendre, agir, bien faire et persuader. Il semble cependant que cette grande intelligence de l’art soit précisément cause que Léonard, qui commença beaucoup de choses, n’en finit aucune. Il craignait que son exécution ne pût jamais atteindre à la hauteur où son génie l’appelait ; il craignait que ses mains, tout habiles qu’elles fussent,