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fresque, comme tout le reste, saint Jean baptisant le Christ. À l’entour, une foule de gens se déshabillent pour entrer dans les eaux du fleuve. Un de ces personnages tire à l’envers ses chausses collées à ses jambes par la sueur. L’expression de son visage et tout le mouvement de son corps indiquent ses efforts d’une manière énergique (5). Le pape, dit-on, accablé d’affaires, ne donnait pas de l’argent au Mantegna aussi souvent que celui-ci en avait besoin. Andrea, pour faire sentir au pape ses oublis, imagina de peindre au milieu de quelques vertus la Discrétion. Sa Sainteté, étant allée un jour le visiter, ne manqua pas de lui demander quelle était cette figure. « La Discrétion, répondit Andrea. — Eh bien ! répliqua le pontife, aie soin de la mettre à côté de la Prudence. » Mantegna comprit ce que voulait dire le saint-père et ne souffla plus mot. Lorsqu’il eut achevé son travail, le pape le renvoya au duc en le comblant d’honneurs et de présents.

Durant son séjour à Rome, Andrea peignit, outre la chapelle du Belvédère, l’enfant Jésus dormant sur le sein de sa mère. Le fond du tableau est occupé par une montagne percée de grottes, où l’on aperçoit des ouvriers travaillant à extraire des pierres. Les moindres parties de ce précieux morceau sont exécutées avec une telle finesse, que l’on a peine à croire que ce résultat ait été obtenu avec un pinceau. Ce chef-d’œuvre appartient aujourd’hui à l’illustrissime seigneur don François de Médicis, prince de Florence, qui le conserve parmi ses choses les plus rares.