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maltraitaient les passants. Les litres ridiculement fastueux qu’ils prenaient gonflaient leur vanité ; et, bien qu’ils ne fussent que duc de la Lune, marquis de la Corneille, ou roi de la Vache, ils étaient très-fiers des mauvais coups qu’ils avaient portés. On a retrouvé, sur une pierre encastrée dans les murs de l’église de Santa-Lucia-al-Prato, cette inscription consacrant la victoire d’un de ces champions :

IMPERATOR EGO, VICI PRÆLIANDO LAPIDIBUS 1544. »

Terminons cette note en empruntant encore au curieux ouvrage de M. Delécluze quelques lignes relatives à une fête demi-religieuse, demi-carnavalesque, au dénouement désastreux de laquelle Vasari fait plusieurs fois allusion.

« Le cardinal légat de Boniface VIII étant allé à Florence, en 1304, pour essayer de ménager un rapprochement entre les Blancs et les Noirs, le peuple eut l’idée de donner une de ces fêtes que l’on se plaisait à célébrer quelque temps avant, lorsque la cité était tranquille, heureuse et florissante. Chaque quartier rivalisa pour amuser la ville. Depuis longtemps les habitants de celui de San-Frediano étaient renommés pour l’originalité de leurs inventions. Cette fois ils s’avisèrent de faire publier à son de trompe que ceux qui voudraient savoir des nouvelles de l’autre monde n’avaient qu’à se trouver, aux calendes de mai, sur le pont alla Carraia ou le long des bords de l’Arno. En effet, ils établirent sur le fleuve des espèces d’échafauds placés sur des