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de San-Clemente (5), Luca de Cortona et Pietro Perugino, il y représenta Pharaon englouti dans la mer Rouge, la Prédication du Christ sur le rivage de la mer de Tibériade, et la dernière Cène des apôtres avec le Sauveur. Dans ce dernier sujet, il mit en raccourci une table et un plafond octogones, qui prouvent son habileté dans l’art de la perspective. On raconte que Sixte IV, pour exciter l’émulation des peintres qu’il employait, promit une riche récompense à celui qui l’emporterait sur les autres. Lui-même devait être juge du concours. Comme on peut l’imaginer facilement, nos artistes déployèrent tous leurs efforts pour mériter le prix. Cosimo, se défiant de la faiblesse de son invention et de son dessin, chargea ses tableaux d’outremer, d’autres couleurs brillantes et de nombreux ornements en or. On n’y rencontrait pas un arbre, pas un brin d’herbe, pas une draperie, pas un nuage, qui ne fût frappé d’une vive lumière. Le jour de l’épreuve arrivé, les peintures de Cosimo furent l’objet des rires et des plaisanteries de ses rivaux, qui, au lieu d’avoir compassion de lui, ne cessèrent de le persécuter de leurs quolibets. Mais, au bout du compte, les berneurs furent bernés. Le pape, grand amateur, mais mince connaisseur, fut séduit par l’éblouissant coloris de Cosimo, auquel il décerna la palme. Bien plus, il ordonna aux antres peintres de couvrir leurs tableaux du plus bel azur qu’ils pourraient se procurer, et de les rehausser d’or, afin qu’ils égalassent la richesse et l’éclat de ceux de Cosimo. Ces pauvres gens, désespérés d’avoir à