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deux ensemble à l’unité et à l’harmonie, ils devaient y tendre d’un effort pareil ; le mouvement ne leur avait-il pas été imprimé pour cela dans leur berceau commun ? Le dogme et la forme de l’Égypte, malgré leur aspect de sagesse et de prévoyance, étaient impuissants à les retenir tous deux. Le sacerdoce égyptien avait confisqué le sentiment religieux du peuple à son profit, et au profit de son usurpation, il avait confisqué encore l’instinct artistique ; mais ce sentiment et cet instinct des peuples, ne sont-ce pas là précisément leur bien le plus inaliénable, ce qu’ils peuvent le moins abandonner, ce qu’ils doivent réclamer le plus vivement, s’ils ont pu y laisser porter une atteinte momentanée ? Ne sont-ce pas là précisément cette intelligence, cette activité divine, qu’aucune organisation sociale ne pourra peut-être jamais contenter, parce qu’elles réclameront toujours de plus sublimes satisfactions et de plus augustes symboles ? La parole immuable qui partait des sanctuaires jaloux de Memphis et de Thèbes était donc loin de pouvoir répondre long-temps à la conscience ; et l’uniformité des symboles qui appuyaient cette parole ne devait pas long-temps satisfaire au génie. L’homme de sa nature s’impatiente sous une protection brutale et s’indigne dans une invocation grossière ; pour s’affranchir du joug d’une loi et d’une prière abrutissantes, il préfère bientôt la révolte et ses dangers à l’obéissance et à sa sécurité. L’origine de l’art grec est là tout entière. L’art grec, on le voit, est sorti de ce sublime mouvement ; écoutez, en effet, le cri des