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chiffrables, en monstrueuses idoles et en bizarres attributs. Le caractère, enfin, de l’architecture et des autres arts chez les peuples de l’Orient est l’exubérance de toutes les forces productives ; leur moyen principal est la répétition sans fin du même effort ; leur résultat général plutôt l’agrégation et le conflit que l’unité et l’harmonie. Caractère, moyens et résultats essentiellement enfants ! Maintenant, que la religion de l’Égypte soit ou ne soit pas une émanation du dogme oriental ; que son art, par conséquent, en procède ou n’en procède pas, nous n’en voyons pas moins chez elle l’art entièrement occupé et gouverné dans le sens de ses croyances. Nous l’y voyons même ainsi à cause de nos renseignements plus certains à un plus haut degré d’évidence. L’Égypte, avec ses dogmes voilés, avec son sacerdoce savant et silencieux, avec ses dynasties absolues, avec ses castes infranchissables, impose à l’art sa grave et muette unité. Les enceintes formidables, les pylones gigantesques, les longues galeries, les lourds propylées défendent les sanctuaires obscurs et étroits qu’oppressent encore de tous côtés les énormes monolithes de granit. L’architecture et les autres arts, subalternisés par elle, se sont efforcés, en Égypte comme dans l’Inde, de satisfaire exclusivement aux prescriptions et aux conséquences du culte, et tout porte à croire que l’idée morale de ces deux pays, quoique liée et solidaire, était cependant profondément distincte ; car, si l’on y est frappé souvent de l’équivalence des intentions et de la conformité des usages, on y est toujours