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faitement leur office. Les autres, lancés dans un ordre d’idées complètement spéculatives, se montrent dessinateurs fort habiles, déploient une foule de projets qui témoignent de leur science archéologique ; mais, étrangers aux notions positives de la construction, qui ne s’obtiennent que par la seule pratique, ils ne réalisent rien. Est-il nécessaire de nous appesantir sur les conséquences de la fatale division que nous avons signalée ? Ne sont-elles pas patentes ? Chaque jour, dans la rue, ne frappent-elles pas les yeux les moins exercés ? De plus, l’architecture, soumise maintenant aux exigences d’une bourgeoisie ignorante et corrompue, semble être condamnée à ne satisfaire que les plus déplorables caprices. Ne demandez à nos architectes ni brillantes inventions, ni sages imitations : ils n’inventent rien, ils ne savent pas même imiter. Ils enfantent des choses sans nom, dans lesquelles on dirait qu’ils se plaisent à prendre le contre-pied, à établir le néant de toute raison. On serait vraiment tenté de croire que depuis six cents ans on n’a travaillé à perfectionner les procédés de la construction, à accroître les moyens d’action, que pour leur rendre facile la réalisation des contre-sens les plus révoltants. À l’arabe, au normand, au lombard, ils marient le grec et le romain ; et de ces accouplements, il sort des monstres qu’ils s’attachent à rendre encore plus hideux par les ajustements dont ils affublent leurs membres rabougris et estropiés. Mais, reconnaissons-le, l’architecture ohéit à une loi fatale et mystérieuse. Intimement liée aux desti-