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mécanicien, et même poëte et musicien. Les arts, véritablement frères, puisaient dans leur mystérieuse alliance une énergie, une vigueur, qui leur faisaient braver et surmonter tous les obstacles. Plus tard, et surtout de nos jours, non-seulement ils ont cessé d’être unis par de secrètes affinités, d’être solidaires l’un de l’autre ; ils se sont encore, chacun de son côté, divisés, fractionnés, à l’infini. Le résultat de cette séparation, de ce morcellement, a été de les réduire à une faiblesse, à un énervement, tels que la moindre difficulté les effraie et les force à reculer. Prenons l’architecture pour exemple. Sans parler des nombreux rapports qui existaient entre elle et les autres arts, examinons ce qu’elle était en elle-même, ce qu’elle comportait à elle seule, ou plutôt quelles fonctions on l’appelait primitivement à remplir. Un coup d’œil sur les œuvres des architectes d’alors suffit pour s’en rendre compte, un mot suffit pour l’expliquer. L’architecture, une et indivisée, embrassait toutes les constructions imaginables. Peut-on en dire autant aujourd’hui ? Hélas non ! Chaque partie est devenue un tout. L’architecture n’est plus une, il y a vingt architectures : d’un même art, on a fait vingt professions, vingt métiers différents, sans qu’il soit permis d’établir entre eux le plus léger contact. Demandez à un de nos architectes un bâtiment de mer, il vous répondra que, de sa vie, il n’a songé à l’architecture navale. Priez-le de retenir, de mouvoir, les eaux d’un étang, d’un ruisseau ; de conduire celles d’un fleuve,