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DONATO.

rêts, aux profondes cavernes, aux insalubres maremmes. Là, se nourrissant de larmes et de soupirs, confiant son repentir et ses lamentations aux tristes dyptiques, il attendait la mort, lorsque l’Église, enfin émue de compassion par ses souffrances et sa rude pénitence, l’Église l’appela dans son sein et foudroya la rage de l’Isaurien. L’art avait compté parmi ses plus acharnés persécuteurs les moines et un pape. L’art maintenant rencontrait ses plus chauds défenseurs sous la tiare pontificale et le froc monacal. Les papes lui ouvrirent leur palais et leurs basiliques, les moines leurs cloîtres et leurs chapelles. Après un long repos dans ces douces retraites, l’art laissa le nom qu’il avait pris à Byzance, et reçut mission de prêcher les doctrines de l’Église qui l’avait abrité, le sacrifice de la chair à l’esprit, de la forme à la pensée, de la beauté au symbole. L’Eglise, bien assurée que l’architecture serait fidèle à ses dogmes, lui donna toute liberté. Elle lui permit de chercher ses inspirations dans les édifices de l’Orient, de multiplier et de varier à son gré les élégants réseaux, les dentelles précieuses, les nervures délicates et hardies, les flèches élancées, les rosaces rayonnantes, les spirales gracieuses, les forêts de colonnes fleuries. Il n’en fut pas de même pour la sculpture. Les vieilles rancunes qu’elle avait inspirées à l’Église n’étaient pas encore éteintes. D’abord reléguée sur les tombeaux, puis admise à grand’peine sous le porche du temple, elle gémit et se désole. Humble servante de l’architecture, il n’y a pour elle ni indépendance, ni joie, ni parure, ni beauté.