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fut pas moins précieuse et utile à ceux qui vinrent après lui.

Qui connaît aujourd’hui le nom de Paolo Uccello, de cet homme dont la vie toute de labeur, de dévouement et de souffrance est si sublime et si touchante ? Victime résignée et volontaire, il défricha un sol couvert de ronces et d’épines ; dans des sillons péniblement tracés, il déposa une semence qu’il arrosa de ses sueurs, et lorsque les fruits parurent il permit à d’autres de s’en emparer. L’oubli fut son partage : personne n’a gravé son nom sur la pierre qu’il a fournie à l’édifice.

Tout aride que semble, au premier aspect, la science dont Paolo fut le promoteur, l’apôtre et le martyr, elle obtint des résultats féconds que l’injustice seule a pu méconnaître.

Les peuples dont la foi se rétrécissait, à mesure que leurs sens s’ouvraient, demandèrent à l’art autre chose que des symboles, langage hiéroglyphique qu’ils se refusaient à entendre. L’idéal symbolique, dont on les avait nourris, ne cadrait plus que médiocrement avec leurs appétits ; désormais, pour les satisfaire, il fallait que la forme vînt en aide à l’idée. Les types sombres et mystérieux, au regard morne et fixe, à la bouche austère et glacée, aux membres grêles et inertes, aux pieds battant le vide, n’excitaient plus chez eux l’adoration, mais la révolte. Ces formules