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GIOVANNI CIMABUE

c’est que, comme le Vasari nous le dépeint, il a pu être ; ce n’est pas là certes une marque indifférente d’authenticité. À l’époque où le Vasari écrivait sous ses impressions et dans son entourage, il n’était pas facile de recomposer de toutes pièces la figure si nette et si vraie qu’il vient de nous montrer. Cimabue, ainsi qu’il nous le présente et malgré quelques erreurs de détail, s’ajuste admirablement à l’époque précise où il le fait naître et agir. Les ouvrages qui lui appartiennent incontestablement, comparés à ceux de ses prédécesseurs ou de ses contemporains qui se sont conservés, nous indiquent distinctement sa supériorité et son effort original. Cimabue a dû être dans son art, le représentant le plus direct, le plus énergique, de ce sentiment d’individualité et de cet instinct de progrès qui dans son temps tourmentaient l’Italie. Sa naissance élevée, la fierté de son caractère, l’influence de ses relations, sa facilité précoce, tout l’y disposait. Le noble enfant de Florence, entre les ouvriers grecs et italiens parmi lesquels sa vocation le poussait, ne voulut pas être un ouvrier. L’art moderne est sorti, qu’on le sache bien, de ce sentiment d’orgueil ; car ce sentiment appelait après soi l’émulation, et l’émulation appelait le progrès. Dante et Vasari sont d’accord sur ce chapitre, si l’on veut y regarder ; et ce chapitre explique lisiblement la renonciation désormais incessante de l’art à la tradition byzantine ; à la forme non pas positivement imposée, comme on s’est plu à le dire, mais relativement consacrée, relativement immobile. Comment donc les promoteurs actuels de la restauration de