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arbitre : les consuls des cordonniers étaient convaincus que, par envie, il fixerait un prix bien inférieur à celui qu’il avait réclamé lui-même. Grand fut leur désappointement lorsque Donato jugea au contraire que Nanni avait droit à un salaire encore plus élevé que celui qu’il demandait. Les consuls se récrièrent fortement contre cette sentence. « Comment ! disaient-ils à Donato, tu voulais nous faire cet ouvrage à meilleur marché, et tu nous forces de donner à Nanni plus qu’il n’espérait lui-même ! Tu reconnais cependant avec nous que cette statue serait meilleure si elle fût sortie de tes mains. » Donato leur répondit en riant : « Peu importe, le travail me coûte moins de fatigues qu’à Nanni ; si vous êtes justes, comme j’aime à le croire, vous devez lui tenir compte du temps qu’il a dépensé. » La décision de Donato reçut donc son effet ; car les deux parties s’étaient engagées d’avance à l’accepter, quelle qu’elle fût. Le saint Philippe est heureusement posé ; la tête est pleine de vivacité et de naturel. Les draperies sont souples, et se prêtent bien au mouvement du corps. Nanni fit ensuite, pour la compagnie des forgerons, des menuisiers et des maçons, quatre saints en marbre qui étaient destinés à occuper une niche près du saint Philippe. Mais, au lieu de former un groupe de ces figures, il les exécuta isolément, et même il en représenta plusieurs les bras étendus, de telle sorte que trois pouvaient à peine trouver place dans la niche. Désespéré, il supplia Donato de réparer sa maladresse. Donato lui dit, en riant de sa mésaven-