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perte de ce capitaine, lui firent des obsèques magnifiques et élevèrent en son honneur une pyramide en bois, surmontée de sa statue équestre plus grande que nature. Ils chargèrent de cette entreprise Jacopo qui s’en tira d’une manière aussi neuve qu’ingénieuse (1). Il forma le squelette du cheval et du cavalier de morceaux de bois assemblés soigneusement, et entourés de foin et d’étoupes étroitement liés avec des cordes et recouverts d’un ciment composé avec de la terre, de la colle, de la pâte et de la bourre de laine. Ce mode d’opérer est vraiment préférable à tous les autres, lorsque, sous l’apparence de la pesanteur, on veut obtenir des figures extrêmement légères. Il est facile de les rendre agréables à l’œil et semblables au marbre, à l’aide de quelques couches de couleur. De plus, elles offrent l’avantage de ne point se fendre comme les statues en terre. Aujourd’hui les artistes ne font point autrement leurs modèles. On est, dit-on, redevable de cette utile invention à notre Jacopo.

Il exécuta ensuite dans la cathédrale de Sienne des sculptures en bois travaillées avec une patience merveilleuse, et plusieurs petits prophètes en marbre qui ornent la façade de la même église. Il aurait sans doute continué ces travaux, si son protecteur, Orlando Malevotti, n’eût pas été chassé par les Siennois, qui étaient en proie à la peste, à la famine et aux discordes intestines.

Jacopo abandonna donc Sienne pour se réfugier à Lucques. Paolo Guinigi, seigneur de cette ville, lui fit construire dans l’église de San-Martino le