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agrandissement et à sa gloire, nobles et laborieux comme elle. Son habileté n’eut que des commissions honorables et graves dans le vieux palais des Médicis. Il pouvait être, en tout point, fier de la faveur de la famille dont l’influence naissante et le courage avaient puissamment aidé Florence à se débarrasser de l’exécrable tyrannie du duc d’Athènes ; de la famille qui, depuis ce grand événement, avait déjà produit Salvestro et Jean, magistrats populaires et intègres, hardis dans les troubles, modérés dans la paix, exempts de trahirons et de lâchetés, d’abus et de vengeances, citoyens enfin aussi utiles que puissants, aussi bienfaisants que riches. Le Vasari vécut dans d’autres circonstances. L’art de Florence, livré aux mains de serviles imitateurs, arrêté à jamais dans sa course, allait s’appauvrir, s’académiser, et finalement s’annuler ; de même que sa liberté et sa dignité, abandonnées à des tyrans lâches et crapuleux, allaient se voir étouffées et flétries, au point que Michel-Ange, ce pieux et fort enfant de Florence, voulut écraser l’Académie et les protecteurs de l’Académie sous la hauteur de son refus de venir mourir à Florence, doublement déshonorée dans son art et dans son indépendance. Le Vasari, chargé par les Médicis de saluer le cercueil de Michel-Ange au nom de ses collègues, eut beau se mettre en frais : ses arguties et ses subtilités plates ne purent masquer l’affront sanglant que le représentant suprême de l’école de Toscane avait entendu faire à ses successeurs dégénérés. Le Giotto ne connut en mourant ni ce mouvement d’orgueil ni ce mouve-