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BUONAMICO BUFFALMACCO.

sait des richesses grossières, il se confiait davantage au calcul pour trouver l’harmonie, il s’abandonnait davantage à la personnalité pour conquérir enfin une physionomie. C’est alors que le grand coup des croisades vint tout précipiter et tout faire aboutir. On retiendra tout ce qu’on voudra, on retiendra tout ce qu’on pourra du passé, l’avenir a envahi le monde. Le moyen-âge aura beau s’indigner et se roidir après contre la renaissance qui le déborde, la renaissance sera partout : et dans les œuvres que le moyen-âge aura pu croire les plus intimes, la renaissance se fera reconnaître aux yeux attentifs. Combien donc alors est confondu l’esprit de schisme et d’exclusion qui appauvrit le domaine de l’art, et qui le ruinerait complètement s’il ne se faisait pas obstacle à lui-même, à cause des idées contradictoires qu’il épouse et qu’il maintient à la fois avec une égale fureur ! Car viendra-t-on maintenant expliquer dans des formules aigres et cassantes, par le spiritualisme chrétien d’un côté, et le matérialisme païen de l’autre, par la foi et par le doute, par le dévouement et l’égoïsme, par la moralité et par l’immoralité, des œuvres qui ont coulé de la même source ?

Les écoles du Midi et celles du Nord n’ont-elles pas été en même temps abritées sous la même protection et sous la même sympathie ? Bien qu’elles aient revêtu des formes différentes, bien que les circonstances, bien que les matériaux prééxistants et l’esprit particulier des peuples aient diversifié leurs œuvres, ne les ont-elles pas néanmoins consacrées