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si grand, que déjà la vie commençait à céder, et la léthargie était si profonde, que tant de secousses et de déchirements purent à peine arracher quelques cris de douleur et quelques vagues démarches. Assurément, si l’empire romain, pour défendre son intégrité, avait pu trouver autre chose que les pâles fantômes de ses premiers Césars et de ses vieilles légions, la guerre contre les Barbares aurait eu un tout autre caractère. Peut-être alors, au point de vue de l’art, le mal aurait-il été plus grand. Une énergique résistance eût amené de vindicatives destructions, et la fureur eût survécu à l’obstacle ; mais, malgré Stilicon, Aétius, Bélisaire et Narsès, les Barbares eurent en réalité peu de chose à démêler avec l’empire. Si chaque horde n’obtint pas un établissement durable et pacifique sur les terres couvertes par son irruption, l’empire n’y fut pour rien. Ce qu’il y eut de vraiment sérieux, de vraiment terrible dans ces guerres, ce furent les dissensions des Barbares entre eux. La possession était l’objet de leurs querelles ; un moment suffisait à leur conquête, mais de longues années pouvaient à peine les y affermir. Cependant toutes ces nations, roulant l’une sur l’autre comme les flots de la mer, au gré de la puissance occulte qui les soulevait, tendaient, malgré leurs convulsions, au repos et à l’équilibre ; chacune cherchant, à peine installée, à consacrer son occupation par des tentatives prématurées d’ordre et d’institutions qui conservassent sa conquête. Or, quelle était cette conquête ? N’était-ce pas la civilisation ancienne avec ses ri-