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et leur amour de l’art, fomenté encore par un fanatisme contraire, leur fit tout braver. La persécution n’est-elle pas ordinairement féconde, quand c’est la conviction qui la reçoit ? Comme les premiers martyrs, les peintres et les sculpteurs se retirèrent dans les bois, dans les carrières, et produisirent à l’envi, dans l’ombre, toutes ces images que leurs dangers rendaient plus précieuses au parti qui les appuyait. Les légendes de ces temps sont pleines de miracles opérés par la Vierge en faveur de ses serviteurs. L’usage de leurs mains coupées, de leurs yeux crevés leur était rendu par son intervention céleste. Et sans s’arrêter plus qu’il ne convient à ces naïfs témoignages, dont le sens au moins est clair, on peut affirmer que les supplices n’interrompirent pas la filiation des peintres grecs, et leurs traditions. D’ailleurs, dès l’origine, la politique de Rome s’était intéressée à ces querelles sanglantes, et elle pressentait déjà le grand événement de sa désunion avec l’église grecque. Aussi de vastes monastères étaient-ils réservés en Italie aux moines artistes, où tout était préparé de longue main pour les recevoir, les consoler et les occuper.

De plus, ce mouvement de l’iconomachie avait, il ne faut pas l’oublier, ouvert de nouvelles et intéressantes voies à l’art. La peinture et la sculpture, forcées de se restreindre dans leurs proportions pour mieux échapper à leurs persécuteurs, s’adonnèrent à de petits ouvrages, figurés et ornés avec d’autant plus de soin, que le travail seul les recommandait. L’art des miniaturistes, des nielleurs sur