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détruite de fond en comble, et qui devint finalement une mosquée : admirable ouvrage de deux architectes, de deux sculpteurs des vieilles écoles grecques de Thralles et de Milet, au temps de Justinien ; ouvrage qui, malgré ses défauts flagrants, inspira si souvent, et d’une manière si frappante et si heureuse, les plus beaux génies de la première renaissance et du seizième siècle, notamment dans l’église de Saint-Marc, à Venise, et dans celle de Saint-Pierre, à Rome.

Quant à l’anathème jeté à l’art par les premiers chrétiens, nous n’avons pas non plus cherché à le dissimuler ; nous avons, au contraire, tenu à le faire ressortir, car nous nous préparons à en déduire plus d’une observation capitale dans nos notes. Cependant nous ne demandons pas qu’on méconnaisse l’esprit dans lequel les premiers Pères de l’Église attaquèrent les arts : c’était leur application païenne surtout qu’ils entendaient poursuivre. Il est vrai qu’ils n’en pouvaient guère concevoir une autre, et c’est ce qui explique leur colère et leur persistance. Mais l’Église, à proprement parler, c’est-à-dire les papes et les conciles, ne se prononcèrent jamais. Elle sembla plutôt attendre que le temps et le cours des choses se prononçassent à sa place, et elle ne parut tenir qu’à pouvoir plus tard, sans s’être compromise à l’avance, sanctionner les faits qui restaient à s’accomplir. Aussi voyons-nous qu’aussitôt que l’Église comprit que le temps était venu pour elle de prendre un parti, les papes et les évêques s’entendirent pour donner le change aux populations,