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plus en plus indépendant, leur exercice de plus en plus assuré par une moralité et une intelligence plus haute, ne seraient-ils pas ce qu’à toutes les grandes époques le christianisme a fait pour l’avenir ? Au moins, est-ce dans ce sens qu’il nous semble que toutes les évolutions fameuses, dans les sciences, dans les arts, dans la civilisation, se sont accomplies jusqu’ici sous le glorieux règne de l’idée du Christ. N’est-ce pas par le plus ample, comme par le plus indépendant emploi des matériaux et des principes artistiques du passé, que se sont élevés ces grands et impérissables monuments, dont le souvenir, quand on l’évoque, soulève avec soi toute l’histoire des temps qui nous les ont légués : Sainte-Sophie de Constantinople, aussi bien que Saint-Marc de Venise, aussi bien que Notre-Dame de Paris, aussi bien que Santa-Maria-del-Fiore de Florence, aussi bien que Saint-Pierre de Rome ; les dômes constantinopolitains autant que les basiliques romaines, les tours romanes autant que les flèches gothiques, et que les doubles coupoles de la renaissance. Le génie artistique, encore jeune, encore consciencieux dans chacune de ces entreprises hardies, a cru consommer son œuvre ; il a cru avoir tout ravi au passé, n’avoir rien réservé pour l’avenir. L’empereur Justinien, dans le chantier de Sainte-Sophie, croyait, dit-on, entendre la voix des anges le conseiller au milieu des irrésolutions de ses architectes. Et quand Sainte-Sophie, comme un ardent et premier soupir vers le ciel, eut lancé ses coupoles incertaines, plus haut que n’avait songé à monter le