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temple chrétien, au contraire, devait recevoir dans son sein les peuples à flots pressés ; il devait les inonder de lumière pour chasser enfin la terreur du sanctuaire désormais hospitalier. C’était là, certes, en apparence, un beau programme pour l’art : mais de long-temps il ne devait rien en sortir. L’église n’attachait pas à l’art un sens assez profond, ni une assez haute portée ; loin de là, elle tenait à distance et refoulait toute recherche vaine et toute adoration profane. Elle regardait le corps de l’homme comme un sépulcre blanchi ; elle n’affirmait pas la beauté du Christ, elle n’avait pas encore songé à la beauté de la Vierge, et le temple de Dieu lui paraissait convenable, pourvu qu’il fût sans ténèbres et qu’il fût grand. Si César et ses patriciens, ses affranchis et ses eunuques, demandaient davantage, l’église laissait faire, n’avait point d’inspiration à donner, et l’atelier païen apportait ses vieilles ressources et ses décorations fanées. Peut-on le nier, quand on voit l’église s’emparer, non seulement de la basilique antique sans y rien changer, mais encore en reproduire complètement et le plan et l’ordonnance dans les nombreux édifices qui s’élèvent à l’envi pour l’exercice du culte ? Les chrétiens vinrent donc librement adorer Dieu dans ces mêmes salles où le préteur, sur son tribunal, les condamnait naguère au supplice. Les hymnes saintes et la parole vénérée du prêtre y remplacèrent le confus murmure des plaideurs et les aigres discussions des avocats. Les pieuses conférences des évêques l’administration désintéressée des diacres y succé-