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duisant dans la basilique de Sainte-Sophie quatre cent vingt-sept statues, arrachées aux sanctuaires païens de la Grèce et de l’Asie, y posant son image à côté de celle du Christ, et celle de sa mère l’impératrice Hélène, à côté de celle de la Vierge, tarissant enfin les carrières de la Phrygie et de l’île de Proconèse, pour ses quatorze palais, pour ses quatorze églises, pour ses huit bains publics, pour son hippodrome, pour son forum entouré d’un portique, terminé par deux arcs de triomphe, et au centre duquel, sur une colonne de porphyre de cent vingt pieds de hauteur, s’élevait son colosse triomphal ; et puis, par on ne sait quel délire, s’irritant contre son propre ouvrage, travailler à le détruire, et grand rassembleur d’images, devenir ensuite une sorte d’iconoclaste, pour retourner bientôt à ses premières adorations et à ses premiers excès. Constantin paraît être, de tous les princes, celui qui a le plus fait travailler. Périclès, Alexandre, Auguste, Adrien, Charlemagne, Jules II, Louis XIV, sont bien loin à cet égard de pouvoir lui être comparés. Il paraît être aussi celui qui a le plus fait détruire ; Attila, Alaric, Odoacre, Alboin, lui cèdent le pas. Constantin, dans cette double fonction d’élever et d’abattre, apparaît avec le même cachet de fureur et de barbarie ; et c’est en ceci qu’il nous semble admirablement résumer son époque artistique.

Si ce que nous avons fait entrevoir de l’état de l’art, sous les derniers empereurs païens, est vrai, si nous ne nous sommes pas trompés en continuant à l’apprécier sous le premier empereur chrétien, et si