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LE CHANSONNIER NADAUD

nue. Il cria un peu haut : à l’ingratitude ! Bref, l’incident filtra dans le public et, peu de jours après, couraient, à travers les salons, les vers suivants dont on attribuait la paternité au grand poète des Harmonies :

Hier le vaincu de Pharsale
M’offrait un dîner d’un écu ;
Le vin est bleu, la nappe est sale ;
Je n’irai pas chez le vaincu.
Mais que la cousine d’Auguste,
M’invite en sa noble maison ;
J’y cours ; j’arrive à l’heure juste ;
Chansonnier, vous avez raison.

Nadaud fut d’autant plus attristé que la moindre insulte au poète malheureux était bien loin de sa pensée, qu’il y avait eu simplement une fâcheuse coïncidence et que l’affaire avait été grossie, envenimée par quelques-uns de ces bons amis que possèdent toujours les grands, les heureux, les méritants dont la situation, le bonheur ou le talent donnent prise à la basse envie.

La vérité néanmoins finit par se faire jour et Lamartine écrivit à Nadaud la lettre suivante en le priant de la rendre publique :

« ..... Il y a quatre ou cinq ans, du plus vieux qu’il me souvienne, vous voulûtes bien me promettre de venir dîner en famille, pour le plaisir de quelques amis, hommes d’esprit et de goût, ravis de se ren-