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CHAPITRE VI

La chambre qu’habitent mes deux frères est un grand studio fait de deux pièces ordinaires. On a démoli une cloison parce qu’ils ne peuvent pas plus se séparer la nuit que le jour. Ils en profitent pour se chamailler à longueur de journée et mener une vie de patachon à laquelle nul, dans la maison, ne semble porter attention.

Nous avons décidé de ne rien faire, cette fin d’après-midi, sauf boire du thé et bavarder.

Claude et Antal, à leurs moments perdus, suivent des cours de droit. On ne les voit jamais travailler, mais, par un incroyable miracle, ils réussissent tous leurs examens.

En ce moment je les regarde, fumant à mes côtés. Ils sont exactement semblables et je ne m’étonne pas qu’on les confonde si souvent. Je me mets à rire.

— Quand vous serez avocats, vous tâcherez de plaider toujours dans les mêmes affaires. Je vois d’ici la tête du président, entendant tour à tour le même type dire les choses les plus contradictoires.

— Oh ! c’est surtout avec les femmes que c’est drôle, dit Antal. Quand nous étions en vacances, en Allemagne, chez nos amis Hardt, j’entre par hasard dans un petit salon d’où Claude venait de sortir. Une femme étendue sur un divan me tend les bras et dit :

— Oh ! liebling, reviens, aime-moi encore !…