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Miracle, c’est mon frotteur du métro ! Nous nous éloignons de la foule.

— Comment êtes-vous venu ici, Monsieur ?

— Je vous ai suivie avec constance. C’est tout ! Je suis resté trois heures devant chez vous. Vous en êtes sortie avec deux garçons qui vous ressemblent et dont j’ai deviné la parenté immédiatement. Arrivé devant la porte, ici, j’ai hésité longuement. Puis j’ai vu des bandes joyeuses qui montaient les bras chargés de paquets. Je suis allé au magasin le plus proche, j’ai pris deux bouteilles de Mumm ; je suis entré à mon tour, j’ai embrassé une dame que tout le monde embrassait, donné mes bouteilles au barman, et puis je vous ai cherchée. J’ai bu avec votre frère et demandé à danser avec vous… Voilà !

Il m’embrasse, je suis émue. Lui aussi ça a dû l’émouvoir. Instinctivement mes yeux se portent à un endroit précis de son pantalon. Il a pris de l’ampleur sous la braguette, on le sent enthousiaste, content de vivre. Il me le fait tâter d’ailleurs, il me regarde, il rougit, je rougis.

Je suis un peu champagnisée par toutes ces coupes que les gens m’ont menée boire au buffet ; je suis gaie. Il me tient par la main, m’entraîne dans une penderie, une sorte de débarras où l’on doit reléguer tout ce qui ne plaît plus.

Il y a ici les toiles d’un peintre qui a été l’amant de Stasia. Du temps qu’elle couchait avec lui, les toiles étaient au salon. Maintenant qu’elle ne le connaît plus, ses natures mortes et ses femmes du monde, longues comme des jours sans pain, sont au débarras, en tas.

C’est ici que mon compagnon veut que je… mais que veut-il au juste ?