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vis, plus tard ce jour-là, dans mon quartier et ailleurs, attiraient une foule de ménagères curieuses autour de l’espèce de gélatine rouge-rubis qui tremblotait dans des seaux de fer-blanc ; mais peu cédaient aux sollicitations des marchands et des pancartes : « Zébi framboise, première qualité. Confiture Tour Eiffel. Plus nourrissant que la viande de bœuf d’après les analyses du Laboratoire de la Répression des Fraudes Alimentaires. 2 francs le kilo, 25 centimes le quart ». Le susdit Laboratoire avait-il donné son autorisation, comme l’affirmaient les Crainquebilles ? Ou bien la police fermait-elle les yeux, en ces jours de relâchement ? Je l’ignore ; mais le fait est que cette substance fut déclarée par les journaux inoffensive pour le consommateur, sinon réellement nutritive. De temps à autre, une ménagère tendait un bol de faïence ou une boîte à conserves, que le marchand remplissait sur la balance en puisant au tas avec une louche de bois à tourner les sauces ; mais la vente manquait d’entrain. Le bon marché du produit le fit un peu dédaigner, au début, tant que sa récolte fut libre, Mais quand un syndicat l’eut trustée, le prix augmenta, et le zébi acquit la vogue populaire.

— Et ça ne se conserve même pas ! conclut Mme Taquet. Ça doit se manger frais, où ça tourne comme du lait.

La concierge partie, je jetai un coup d’œil sur les journaux. J’ai déjà parlé de l’arrêt complet des services,