Page:Variétés Tome X.djvu/67

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

langue latine en bouche, que vous la devez avoir aussi familière comme la maternelle ; or, tout ce que j’ay raconté ne sont que petits peccadilles, pechez veniels parmy vous autres ; vos predicans vous absolvent de tout cela, et, comme dit l’evesque de Lyon14 en la Confession de la foy, le merite d’estre ligueur est plus grand que ne sont grandes toutes les offences que le ligueur pourroit commettre15. Voylà une belle confession de foy, et vrayment digne d’un tel prelat. S’il n’a point d’autre hostie pour expier l’offence de son double inceste16, je parie la perte de son ame ; mais que dis-je, son ame ? les ligueurs ne croyent aucune ame qui puisse recevoir ou peine ou salaire en la vie future, laquelle aussi ils ne croyent point ; et plus je m’estudie à rechercher le sommaire de leur creance, et moins j’y attains. Je pense bien qu’ils croyent Dieu ; aussi font les diables. Ils le croyent et en ont terreur ; mais de


14. Pierre d’Espignac, archevêque, et non évêque de Lyon, dont on se moque à tant de reprises dans la Ménippée.

15. Ce sont, en effet, les doctrines dont il fit profession en maintes circonstances, notamment à la célèbre conférence de Surêne. V. cette Conférence, 1593, in-8º, p. 83.

16. Pierre d’Espignac avoit deux sœurs, de chacune desquelles il avoit un neveu ; l’un qui se nommoit Edme de Malain, baron de Luz, et l’autre Chaseuil. De Thou, t. V, liv. 108, p. 414. — C’est au premier de ces deux fils incestueux que l’archevêque de Lyon dut de ne pas partager à Blois le sort du cardinal de Guise. Henri III, qui aimoit beaucoup le baron de Luz, lui accorda la vie de P. d’Espignac. De Thou, t. IV, liv. 93, p. 378.