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Le Faict

 
Qu’il a bien du renom assez,
Et non des thresors amassez ;
N’ayant en toute sa puissance
Qu’à Castres, bien loing de la France,
Deux offices de receveur,
Qu’il a receus par la faveur
Du feu Roy d’heureuse memoire[1].
Par là vous en sçaurez l’histoire ;
Et, pour vous faire voir l’excez
Du train de ce maudit procez,
Il faut qu’en mon chant je desgoise
Le vray subject de ceste noise.

    les mêmes plaintes : ainsi au livre IX de ses Poëmes, dans ses vers à Belot ; et dans son Epistre à M. de la Molle, où, entre autres choses, il avoit dit :

     
    Quand, malcontent, resveur, je panse
    Que vingt et cinq ans par la France
    J’ay faict ce malheureux mestier
    Sans recevoir aucun salaire
    De tant d’ouvrages qu’ay sceu faire,
    Oh ! que j’eusse été coquetier !

  1. Charles IX, suivant Colletet, dans sa Vie manuscrite de Baïf, l’avoit fait secrétaire ordinaire de sa chambre ; « et, ajoute-t-il, comme ce prince liberal et magnifique luy donnoit de bons gages, il luy octroya encore de temps en temps quelques offices de nouvelle creation, et de certaines confiscations qui procuroient à Baïf le moyen d’entretenir aux études quelques gens de lettres, de regaler chez lui tous les savans de son siècle et de tenir bonne table. » Baïf fit trop en conscience ces bombances littéraires dont on lui confioit les fonds. Quand, après Henri III, qui avoit repris de son frère le rôle de protecteur de cette compagnie, l’argent cessa d’être fourni, notre poète, qui n’avoit rien gardé, se trouva sans un écu.