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leurs femmes desrobent ; et, de vray, y avoit butin de cinq cens escus, tant aux conviez qu’à plusieurs autres. Nous fusmes descouverts pour quatre francs qu’un jeune marchand perdit qui dançoit aux nopces, lequel avoit fermé sa maison et ses coffres. Cela empescha que feit ouverture. Les paysans se jettent sur noz malles, et nous sur leurs vallizes et sur leurs testes, et eux sur nostre dos, à coups d’espée et de poictrinal46, et noz dames à coups de cousteau : de façon que nous les estrillasmes bien. Ces paysans se vont plaindre au gouverneur de Moulins. Ce qu’ayant ouï, envoyé vingt-cinq cuirasses et cinquante harquebuziers pour nous charger. L’une de noz femmes, qui estoit à Moulins, nous en donna l’advertissement, et nous falloit passer une rivière qui nous incommodoit. Nostre capitaine s’avance au grand trot et laisse un poitrinalier demie lieue derrière, luy enchargeant qu’aussitost qu’il descouvriroit quelque chose, il nous advertist de leur nombre, ce qu’il fist. Le capitaine ordonne ce qui en suit :

L’ordre de pitié.

Tout le monde fut commandé de mettre pied à terre, et feindre les hommes d’estre estropiez et blessez, et commande à deux femmes de se laisser tomber de cheval et faire les demies mortes. L’une,


46. Ou pétrinal, sorte de long pistolet ou de petite carabine qu’on tiroit en appuyant la crosse sur la poitrine, d’où son nom.