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C’estoit lors d’une assemblée generale où tous les plus signalez gueuz de France estoient assemblez, comme grands coesres, premiers cagouz, avec autres de respect envers leurs supérieurs, comme une court de parlement à petit ressort. Je vous deduiray ci-après ce que j’en appris en neuf mois.

Vous croirez qu’en toutes les provinces il y a un chef de ces docteurs, chose certaine ; et selon qu’il a esté créé vient recognoistre le chef appelé le grand coesre22, et payer le devoir, et faut notter que tous les chassegueux qui sont aujourd’huy aux villes sont grands coerses et tirent de l’argent.

L’assemblée et ordre qu’ils tiennent à leurs
estats généraux
.

Ils s’assemblèrent tous à l’issuë d’un grand village près Fontenay le Conte et là, le grand coesre, qui estoit un très bel homme, ayant la majesté d’un grand monarque et la façon brave, avec une grande barbe, un manteau à dix mille pièces, très bien cousues, une hoquette23 bien pleine sur le dos, la


22. « Premièrement, lit-on dans le Jargon ou Langage de l’argot réformé…, édit. des Joyeusetez, p. 5, ordonnèrent et establirent un chef…, qu’ils nommèrent un grand coére ; quelques-uns le nommèrent roi de Tunes, qui est une erreur. »

23. Petit paquet où l’on mettoit son linge et qu’on portoit d’ordinaire au bout du bâton appelé hoquet. Quelquefois ce dernier mot se prenoit dans l’un et l’autre sens. Il prêtoit fort aux équivoques ; aussi l’on ne manqua pas d’en faire. D’abord, par exemple, on dit, dans le sens de vomir, compter ses hoquets ; puis, par une évolution toute