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ou sur le pelard, c’est sur le foing, sur fretille, sur la paille, sur la dure, la terre. Ces quatres sortes de coucher ne nous manquoient, selon le temps ; car si nos hostes faisoient difficulté de nous loger où la nuict nous prenoit, s’il pleuvoit, nous logions dans l’abbaye rufante, et au beau temps sur le pelardier, c’est-à-dire le pré, et là espionnions les ornies, sont les poules, et etornions, ce sont poulets et chapons, qui perchent au village dans les arbres, près des maisons, aux pruniers fort souvent, et là attrimions l’ornie11 sans zerver, et la goussions ou fouquions pour de l’aubert, c’est-à-dire manger ou vendre ; et en affurant12, selon nostre vouloir et commodité, nous trouvions souvent à des festins où les pechons passoient blesches et coesmes, selon leur capacité. Ainsi faisans bonne chère, chacun apportoit son gain ou larcin, que je ne mente ; j’use de ce mot de gain, parce que tous les larrons en usent. Ceste vie me plaisoit, fors que mon compagnon me faisoit porter la balle en mon rang ; mais les courbes m’acquigeoient fer-



aux mauvaises tavernes du quai de la Ferraille (l’ancienne vallée de Misère), où les raccoleurs embauchoient les recrues ?

11. Attrimer, prendre ornie la poule, de ορνις, oiseau, éloit le tour le plus ordinaire du métier de ces maraudeurs. V. Le Jargon ou Langage de l’argot réformé, etc., au t. VIII des Joyeusetez, p. 74. C’est de là sans doute qu’est venue la locution populaire plumer la poule, qui étoit si bien en usage alors, et que nous avons déjà tant de fois rencontrée. V. aussi Fæneste, édit. elzev., p. 128.

12. Volant, de furari, qui a le même sens en latin.