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Au diocèse de Rieux, sous le ressort du parlement de Toulouse, y a une petite ville nommée Artigue2, assez près du comté de Foix, en laquelle vindrent par cy devant demourer deux frères, l’un nommé Sance3 et l’autre Pierre Guerre, qui estoient des environs de Bayonne ; et après avoir longtemps audict Artigue travaillé à faire de la tuille et de la brique, ils devindrent assez aisez pour gens de petit estat. Le dict Sance fut là marié, et de ce mariage eut quatre filles et un fils nommé Martin, lequel estant encore bien jeune fut marié à Bertrande Rolse, laquelle aussi estoit agée à peine de dix ans, tant est le desir non pas seulement aux grands seigneurs, mais aussy aux mécaniques, de marier leurs enfans de bonne heure pour voir en eux revivre leur nom et regenerer leur posterité. En ce mariage demeurèrent huict ans entiers sans avoir d’enfans, tellement qu’on estimoit que la dite Bertrande fust liez (comme ils appellent) par quelque sorcière4. Mais enfin il advint qu’ils eurent un fils, qu’ils nommèrent Sance, ainsi que le père grand. Et desjà avoient esté dix ans ensemble fort aimablement et sans avoir jamais eu aucune riote et


2. C’est Ardigat, dans le département de l’Arriége, arrondissement de Pamiers.

3. Sanche ou Sanchez.

4. Je savois bien qu’en pareil cas, parlant des hommes, on disoit lier l’aiguillette, mais j’ignorois que la même métaphore fui employée pour les femmes. Elle perd de sa justesse en changeant de sexe, et finit même par ne plus être compréhensible.