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icelle finie, chacun de messieurs les godelureaux prindrent leurs maistresses et s’allèrent ainsi coucher ; la couratière ne fust si tost partie, et eux asseurez dans la chambre, que on eût peu entendre comme les accorts de trois bateurs dans une grange : car je m’asseure qu’il y en avoit un pour chacune de mes dames les bourgeoises, je ne sçay si elles sçavoient la musique, mais elles tenoient grandement bien leur partie ; de telle sorte qu’en cet exercice, ou bien à dormir, si bon leur sembloit, ils passèrent leur temps jusques au lendemain dix heures du matin. Ce que voyant madame la couratière, à qui la gueulle gagnoit de desjeuner, alla heurter à leur porte, leur portant à chascun de quoy prendre un bouillon, comme à des nouvelles mariées6 ; ce que voyant messieurs les muguets7, qui estoient


6. C’est ce qu’on appelle encore le chaudeau dans quelques villes de province où cet usage s’est gardé. Les convives de la noce l’apportoient de bon matin en grande cérémonie, à la suite d’une aubade sous la fenêtre des époux. V. notre Histoire des lanternes de Paris, p. 12, et une très curieuse chanson qui se trouve dans le Recueil du Savoyard. En Écosse, on appeloit cette boisson nuptiale le sack-posset. Il y entroit du vin, de la crème, du sucre, de la muscade. V. W. Scott, Quentin Durward, conclusion.

7. Ce mot, avec le sens de galant, étoit depuis long-temps dans la langue. V. Rabelais, liv. 1, ch. 8, et liv. 4, ch. 43. Ce passage de Roger de Collerye, édit. Ch. d’Héricault, p. 286, semble en donner l’étymologie :

Cy-gist le bon honorable Huguet…
Qui en son temps ne feist jamais le guet
Aux amoureux qui cueillent le muguet.