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L’heure s’approchant qu’il falloit partir de ce lieu pour venir coucher à Paris, pour autant qu’elles ne desiroient y arriver de jour, crainte d’estre descouvertes, après avoir satisfait au logis, montèrent à cheval, ayant chacune leur conducteur, et en ceste sorte arrivèrent sur les sept à huict heures du soir, au logis designé, où le soupper les attendoit. Estant donc en iceluy, la couratière5, après leur avoir faict les caresses accoutumées, les conduict dans un petit corps de logis sur le derrière, à cette fin de mieux et plus facilement prendre leurs esbats sans estre inquietés de personne ; incontinent on leur apporte le soupper sur la table, pendant lequel on leur prepare trois licts. Il ne faut pas demander si l’issue du soupper fut remplie de gaillardise, où le muscat et l’hypocras n’y fut point epargné, si bien qu’après avoir passé joyeusement une partie de la nuict, la couratière, qui estoit grandement enluminée, se voulant aller retirer dans son cartier, commença sa harangue sur les effets de l’amour, pendant laquelle elle eust assez bonne audience. Estant


aux gens de qui l’on parle mal. Cela nous donne l’étymologie du mot tintouin, qui d’abord ne s’employoit pas autrement. On trouve même dans Montaigne le verbe tintouiner.

5. On sait que couratier, couratière, sont les anciennes formes des mots courtier, courtière. Ils se prenoient souvent, comme ici, en mauvaise part, pour désigner de bas entremetteurs :

Il devint en un jour savant en tel metier,
Maquignon, revendeur, affronteur, couratier.
Maquignon, reven(Ronsard, Hymnes, liv. 2, 10.)